53 propositions pour concilier protection et développement en montagne

Réformer la loi montagne : trop difficile mais en adapter quelques points pourquoi pas. C’est en tous cas ce que pense les rapporteurs de la Commission du développement durable…du Sénat. En effet, Le rapport d’information de la sénatrice des Alpes-maritimes Hélène Masson Maret (UMP) et de son collègue savoyard André Vairetto (PS) sur le patrimoine naturel de la montagne présenté hier au palais du Luxembourg s’inscrit dans le cadre d’une adaptation de la Loi du 9 janvier 1985 qui voulait concilier développement et protection de la montagne vingt ans avant le grenelle de l’environnement. Ce rapport sur la protection et la mise en valeur du patrimoine naturel de la montagne établi après plus d’une soixantaine d’auditions propose quelques coups de projecteur bienvenus sur les sujets qui fâchent : « la fuite en avant de l’immobilier de montagne », le pastoralisme et l’agriculture, la gestion de l’eau ou l’ombre des grands prédateurs. Intitulé « concilier protection et développement », il est accompagné de 53 propositions, tenant compte de l’adaptation au changement climatique.

Les rapporteurs hier à la conférence de Presse, (c) Gregoire Clouzeau

Parmi les conséquences du réchauffement, les sénateurs évoquent une recrudescence des risques naturels (crues, avalanches…) dont les conséquences économiques nécessitent, a minima, plus de crédits pour la politique de restauration des terrains de montagne (RTM) et le maintien des crédits alloués à l’ONF déjà fortement baissés ces dernières années.

Autre sujet sensible : les parcs nationaux ! Afin d’apaiser les crispations entre les autorités administratives gestionnaires et les populations locales, les rapporteurs proposent de « rendre possible un recrutement local des gardes des parcs nationaux par un système de validation des acquis d’expérience. Ce recrutement local serait une manière d’obtenir une plus grande harmonie entre les gardes et les populations. »

Mais surtout, les propositions 11 et 12 ne manqueront pas de réveiller quelques querelles à l’heure ou près de 25 % des communes ne souhaitent plus adhérer au PN ! En effet, la 11 veut étendre la dotation générale de fonctionnement à toute les formes réglementaires de sauvegarde d’espaces protégés proportionnellement à la surface de la commune située dans le PN. Quant à la 12, elle vise à permettre l’adoption e la réglementation des cœurs de parc même en cas de rejet des chartes par une majorité de communes de l’air d’adhésion en dissociant juridiquement cœur et zone périphérique !

Nos élus se disent très préoccupés par l’accroissement de la population de loup et ses conséquences sur le pastoralisme soulignant les millions d’euros alloués à la protection des espèces mais aussi à l’indemnisation des éleveurs ! Outre le loup, ils soulignent les problématiques liés aux rapaces et ours… Sur la question du loup, « espèce strictement protégée » au regard de la convention de Berne, les deux sénateurs suggèrent de reclasser le prédateur de l’annexe 2 vers l’annexe 3 de la convention, pour en faire une « espèce protégée simple ». Et d’abonder dans le sens de la proposition de loi visant à créer des zones de protection renforcée contre le loup votée par le Sénat en 2013.

Enfin concernant le tourisme, le rapport déplore le caractère irrationnel de l’urbanisme en station. André Vairetto est favorable à un «Grenelle de l’immobilier touristique en montagne. Il est devenu urgent de passer de la construction à la réhabilitation, puis à l’exploitation. » Une simplification des UTN (Unités touristiques nouvelles) est préconisée pour les projets de moindre envergure, à examiner au niveau du département et non plus du massif.

Les rapporteurs proposent de modifier le code de l’urbanisme pour créer une sous-catégorie de zonage en « hébergements touristiques banalisés », tels que hôtels, clubs de vacances, ou résidences de tourisme, afin de permettre aux communes de s’assurer de la pérennité marchande des lits touristiques.

Et de suggérer une réorientation des incitations fiscales par deux biais : en ouvrant aux communes la possibilité de moduler la taxe foncière, en fonction des taux d’occupation et en supprimant les aides pour l’investissement locatif dans l’immobilier de loisir neuf. Resterait donc à trouver un dispositif encourageant la réhabilitation du parc locatif existant, assorti d’une obligation de mise en location d’au moins 15 ans.

Au passage le rapport tacle aussi les Plans de prévention des risques et les rapports entre l’Etat, «qui se charge de « dire le risque», dans une optique de protection maximale, et les élus locaux, qui ne veulent pas être privés de possibilité de développement». Le rapport demande de revoir le projet de « zones jaunes », signalant un risque tri-centennal d’avalanche. Enfin, il aborde rapidement la problématique de l’hydro énergie et bien entendu de la gestion de l’eau notamment lorsque celle-ci est utilisée pour la création de neige artificielle !

Reste bien entendu que ce rapport restera sans doute lettre morte s’il n’y a pas de réelles volontés de réformer la Loi. Nos deux sénateurs entendent donc proposer des amendements notamment lors de l’examen de la loi d’avenir…A suivre donc.

Le document final sera en ligne sur le site du Sénat d’ici quelques jours.

Laisser un commentaire

un × cinq =