ttirés par les parois et les pics de granite grandioses des monts Wohlthat, en Antarctique, l’alpiniste Mike Libecki et son équipe ont passé une semaine à repérer des cimes potentielles. Avant de se lancer dans deux premières ascensions et d’endurer le vent, le froid et la montagne.
Le grondement à l’extérieur de ma tente ressemble plus à un tremblement de terre qu’au vent. Instinctivement, je me recroqueville davantage dans mon duvet. J’ai déjà eu affaire à des vents terribles : le rugissement nocturne du jet-stream dans l’Himalaya ou le hurlement effrayant d’une tempête en Patagonie. Là, c’est pire.
Le sol tremble quand la bourrasque suivante fonce sur moi. Ma tente est attachée entre deux rochers dans un coin sauvage et désolé des monts Wohlthat. Mes trois coéquipiers sont terrés pas loin.
À 80 km au sud se trouve la limite du plateau Antarctique, les hautes terres glacées qui dominent l’intérieur du continent. Ici, la géographie et la gravité se combinent pour déchaîner de puissants vents catabatiques, des vagues d’air froid qui dévalent les couloirs montagneux vers la mer comme des avalanches.
La rafale frappe. Les piquets de ma tente se tordent vers l’intérieur, faisant s’effondrer la toile sur moi. Pendant un moment, j’entends le bruit de mitraillette d’une couture en train de se déchirer. Puis, tout à coup, je me mets à tournoyer en l’air et dans tous les sens.
Toujours à l’intérieur de ma tente, je suis soulevé par le vent, projeté contre un mur de pierre que j’avais grossièrement construit en guise de protection, puis balancé par-dessus. Livres, chaussettes sales et matériel photo sont éparpillés sans distinction. Des plumes s’échappent de mon duvet.
Je ressens des picotements dans mon cou et mes épaules.
Je rampe jusqu’à un trou dans la toile et l’agrandis davantage. Le sable et la neige me brûlent les yeux quand je sors la tête pour hurler « à l’aide » dans la tourmente.