https://www.youtube.com/watch?v=p17mtivntgk
« Arthur, allez jouer de la musique dans les montagnes – ce serait un beau projet! » Mes parents m’avaient dit cela plus d’une fois. Mais jusqu’à récemment, je n’aurais jamais osé en faire une réalité. Lorsque j’ai déménagé de Paris à Chamonix pour le lycée, je voulais d’abord construire une base solide en alpinisme, pour gagner tranquillement mes rayures avant de plonger dans des idées plus non conventionnelles.
Et puis, il y a environ un an, quelque chose a changé – c’était comme le bon moment. J’avais trouvé l’endroit idéal: un itinéraire légendaire perché le long de la crête Cosmiques, un classique de l’escalade de Chamonix, et un cadre idéal pour fusionner mes deux passions – l’escalade à haute altitude et le violoncelle. C’est ainsi qu’une idée légèrement folle est née: à travers les cordes. Le but? Envoyez le crack numérique (8a, l’une des plus hautes montées sportives d’Europe) lors de mon premier essai … et suivez-le avec une performance musicale au sommet.
Deux amis de confiance m’ont rejoint: Jean Rouaux, partenaire d’escalade et alpiniste, et Noa Barrau, qui documenterait l’aventure sur le film. Depuis le sommet de l’Aiguille du Midi, nous sommes descendus la crête Cosmiques avec un long rappel pour atteindre la base de la flèche. Le transport d’équipement était épique – entre l’équipement alpin, l’équipement bivouac et… un violoncelle, chaque mètre compté. Il nous a fallu des heures pour tout mettre en place.
Nous avons ensuite dû gravir l’arrière du monolithe de granit via un 6B, avec le violoncelle attaché à mon dos. Une montée à la fois absurde et magique. Une fois l’instrument perché sur le dessus, le projet pourrait commencer.
Première tentative de crack numérique. Le Crux exigeait chaque once de force mentale que j’avais. L’altitude a commencé, mes jambes tremblaient et la technicité de l’itinéraire m’a poussé à mes limites. La ligne, une montée très «de style chamonix», se déroule en trois sections principales: un pas de 6C relativement facile mène à un rebord, où les choses deviennent sérieuses. Vient ensuite le nœud intense – une dizaine de mouvements brutaux sur des micro-combats avec à peine les pied, une section où plusieurs séquences sont possibles. Ensuite, l’étirement final, une séquence spectaculaire et aérée, moins physique mais tout aussi exigeante, qui a testé à la fois ma technique et ma endurance mentale. Avec des encouragements de grimpeurs traversant le glacier ci-dessous, j’ai coupé les chaînes. Victoire!
Puis est venu la deuxième partie: la musique. Mes mains, grattées et gelées du rocher, pouvaient à peine bouger. Le vent a repris. J’étais épuisé. Mais le retourner n’a jamais été une option. J’ai joué la pièce comme prévu. Noa a capturé le moment, a pris quelques coups supplémentaires pour le film, et nous pensions que le projet était dans le sac.
La nuit est tombée. Nous avons installé la tente, soulagée et fier … jusqu’à 3 heures du matin, un orage a explosé au-dessus de nous. Le Thunder nous a secoué. Sans aucun doute – nous avons dû bouger. Ayant une fois enduré une descente à travers la foudre sur la face nord des grandes jorasses, je savais que je n’ai jamais voulu répéter cela.
Nous avons attrapé les éléments essentiels – le violoncelle, bien sûr – et nous sommes retournés jusqu’à l’Aiguille du Midi dans la neige, sous les grondements de la tempête. Tiré mais sûr, nous sommes arrivés à la station de téléphérique. Le reste de l’équipement est resté derrière.
Ce n’est que quelques jours plus tard, une fois que la météo s’est effondrée, que nous sommes revenus pour récupérer la tente, les sacs à dos, les drones et tout l’équipement que nous avions été contraints d’abandonner. Tout était toujours là. Intact.
Une aventure unique – athlétique, artistique et indéniablement alpine. Un moment éphémère suspendu entre le granit, les cordes d’escalade et les cordes de violoncelle, que je n’oublierai pas à la hâte.
J’espère que c’est un hommage approprié à Maurice Baquet, qui, encadré aux côtés de Gaston Rébuffat, jouait déjà de la musique là-haut – notamment au sommet du Mont Blanc dans les années 1950 et 60!
– Arthur Poindefert