Poil caché ici, poil apparent là. Et je ne parle évidemment pas de ceux des bouquetins, chamois et autres marmottes que l’on peut observer lors des balades en montagne. Précisément, le Niederhorn – magnifique point de vue sur les sommets et sur le lac de Thoune – est, non loin d’Interlaken, l’un des lieux privilégiés pour observer les bouquetins de l’Oberland, souvent peu farouches, qui vivent en nombre sur les flancs du Gemmenalphorn voisin. Pas de chance cette fois-ci : mis à part un grand mâle au repos sur un rocher et quelques jeunes vite disparus dans les chaos rocheux, très peu de ces formidables acrobates au rendez-vous. Une déception vite effacée par l’arrivée, au croisement d’un sentier, d’un trio d’animaux à poils inattendu : deux mâles et une femelle bipèdes, équipés de chaussures de marche, de sacs à dos et, comme l’impose de plus en plus la mode en montagne, de bâtons de randonnée nordique. Mis à part ces équipements, rien sur le corps, au risque de subir la morsure du soleil ou, lors des pauses, d’exposer ses parties intimes à la morsure de fourmis agressives. Mais le naturisme est, paraît-il, plus qu’un mode de vie : une philosophie, affirment les plus accros.
Un mode de vie présent partout en Europe dans des lieux dédiés, mais rarement en pleine nature, hors des camps autorisés. En cela, la Suisse fait désormais exception, et les adeptes de la randonue se multiplient, notamment dans les cantons de l’Est du pays où, malgré le risque d’une amende pouvant atteindre 200 francs suisses, il n’est pas rare de rencontrer des randonneurs dévêtus, voire des skieurs de fond n’ayant froid ni aux yeux, ni au reste ! Certains, dans le sillage de Puistola Grottenpösch, pratiquent même l’escalade et l’alpinisme en tenue d’Ève ou d’Adam, au risque, pour les hommes, de se râper la chipolata ou les roubignolles sur les aspérités de la roche. Mais il faut savoir ce que l’on veut, et les menus désagréments semblent ne pas décourager les amateurs. De là à affirmer, comme le font certains, que la randonue est en voie de progression semble pourtant sujet à caution, des spécialistes de la question affirmant le contraire en se référant à un retour marqué de la pudeur chez les jeunes.
Cachés ou apparents, les poils font parler dans la Confédération et ne manquent pas de susciter, ici et là, chez nos amis suisses, des commentaires parfois désobligeants. Mais la tradition d’accueil est là qui impose, la plupart du temps, le silence en public et limite même les regards désapprobateurs.
Le site http://www.randonue.com/