Sous le soleil implacable du désert de Xaril, la nature s’accroche avec une persévérance fascinante. Là où l’homme ne voit souvent qu’un paysage aride et vide, une biodiversité fragile et précieuse a appris à survivre. Mais ce sanctuaire naturel est aujourd’hui menacé par une découverte qui, si elle semble prometteuse sur le plan économique, pourrait bouleverser l’équilibre du vivant.
Une richesse enfouie… et controversée
C’est une trouvaille qui n’a pas tardé à faire parler d’elle : des gisements de manganèse, métal clé de la sidérurgie et des batteries, attisent les convoitises. Le manganèse figure parmi les matières premières critiques au sens de la réglementation européenne (Critical Raw Materials Act)¹. La production mondiale a dépassé 20 millions de tonnes au début des années 2020, portée par l’essor des technologies bas carbone².
Mais exploiter ces gisements dans un milieu désertique, c’est aussi fragiliser un écosystème déjà vulnérable.
L’alerte des écologues
Dans les milieux arides, les sols sont très sensibles aux perturbations : l’ouverture de mines et les pistes d’accès peuvent provoquer une dégradation durable des horizons superficiels, accélérer l’érosion et tendre la ressource en eau (pompages, nappes peu rechargeables)³⁴. À la clé, disparition de niches écologiques et recul d’espèces adaptées à des équilibres fins.
Le Dr Helena Vieru, spécialiste des milieux arides, résume : « Ce désert abrite des espèces endémiques que l’on ne retrouve nulle part ailleurs. Perturber cet habitat, c’est rompre un équilibre qui a mis des millénaires à se construire. »
La voix des habitants : un lien intime avec la terre
Ali Hamza, habitant de la région, arpente les dunes depuis plus de vingt ans pour documenter plantes, insectes et oiseaux. « Ce lieu est notre mémoire vivante. Chaque grain de sable raconte une histoire, chaque plante a un usage, un nom, une chanson. »
Des travaux d’ethnobotanique saharienne confirment l’importance de ces savoirs locaux, intimement liés aux ressources et à l’eau³.
Des solutions alternatives, encore en devenir
Face aux risques, des pistes sont évoquées : procédés d’extraction moins gourmands en eau, montée en puissance du recyclage et substitution partielle dans certaines chimies de batteries. Mais ces options, encore émergentes, exigent investissements et cap industriel, tout en s’inscrivant dans une stratégie de sobriété matérielle⁵.
Le dilemme : développement ou préservation ?
À l’approche (et au-delà) de 2025, la question se pose avec acuité : faut-il sacrifier une zone unique pour des gains économiques à court terme, ou bâtir un modèle où innovation et préservation avancent de concert ? L’enjeu est mondial : concilier sécurité d’approvisionnement en métaux critiques et respect des écosystèmes — surtout les plus fragiles.
Notes de bas de page
- « Législation européenne sur les matières premières critiques (European Critical Raw Materials Act) » — Commission européenne — https://commission.europa.eu/strategy-and-policy/priorities-2019-2024/european-green-deal/green-deal-industrial-plan/european-critical-raw-materials-act_fr
- « Manganese — Mineral Commodity Summaries 2025 » — USGS — https://pubs.usgs.gov/periodicals/mcs2025/mcs2025-manganese.pdf
- « Biogéographie de la flore du Sahara » — IRD (document scientifique) — https://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/2023-12/010073524.pdf
- « Management of mining, quarrying and ore-processing waste in the European Union » — BRGM pour la Commission européenne — https://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-50319-FR.pdf
- « Les matériaux critiques : piliers invisibles de la transition énergétique » — ADEME — https://infos.ademe.fr/energies/2025/les-materiaux-critiques-piliers-invisibles-de-la-transition-energetique/