Donner des noms aux montagnes

Aoneker est une entreprise située en Patagonie, connue pour développer et produire des cartes de tourisme de montagne vendu en Argentine, au Chili et dans d’autres pays. (disponible chez www.topostation.com) Toutefois, Aoneker est un peu plus que ça, il se dise : ‘spécialisée dans le développement et l’analyse d’information géographique.’
Par conséquent, Aoneker vend de l’information géographique sous différentes formes, soit sous forme de cartes ‘sur mesure’, ou directement des  informations numériques disponibles en divers formats graphiques, CAO ou de SIG. Diego Vallmitjana nous propose via le blog de son entreprise une petite réflexion sur le fait de donner un nom à nos montagnes…


Texte traduit de l’espagnol par Benjamin Ribeyre (texte original)

Chez Aoneker, nous faisons des cartes, habituellement de lieux nouveaux et inconnus. Il n’est par conséquent pas rare de faire une carte et de voir apparaître des nouvelles montagnes qui n’ont jamais été répertoriées.
Ces noms proviennent souvent de la collecte d’informations liée à la confection de la carte. Souvent nous collaborons avec la population locale, mais nous nous appuyons aussi sur beaucoup d’anciennes cartes. C’est ainsi que beaucoup de noms semblent être « perdu » car peu de gens les connaissent. Mais il arrive aussi de temps en temps que quelqu’un veuille mettre un nom à une montagne.

Cela se passe souvent ainsi : une personne gravit un sommet supposé « vierge », et décide de lui donner un nom. Puis il nous contact et nous demande d’ajouter le nom sur les cartes.


Est-ce bien ainsi ?

Donner un nom à une montagne est un acte fort et très émouvant, on peut même parler d’acte héroïque. C’est une action qui transcende les peuples, car le nom possède une dimension à jamais sacrée et sera pour toujours utilisé. Nommer une montagne c’est un peu comme créer une identité, un drapeau ou encore un hymne. Cela nous fait grandir en tant que personne. C’est pour ces raisons que c’est un acte que j’affectionne.


Mais…

« Les vrais héros ne sont pas ceux qui réalisent tous les défis, ce sont ceux qui en laisse parfois de côté, sachant qu’ils peuvent les faire, pour que d’autres les réalisent. »
Les vrais héros sont ceux qui montrent le chemin. Escalader toutes les montagnes et leur donner un nom c’est facile…, mais il est des fois plus héroïque, plus difficile, de gravir une montagne « sans lui donner de nom ».
Ainsi, l’acte de « ne pas nommer  une montagne », est souvent plus valeureux que celui de nommer. On peut le voir ainsi : si l’on monte sur toutes les montagnes et qu’on leur donne toutes un nom, nos enfants n’auront plus aucune montagne à gravir et nommer.
N’est-il pas égoïste de notre part, de ne rien laisser aux générations futures ?

Il y a quelques années pour la majorité de l’humanité, GoogleEarth nous a montré qu’il n’existait plus aucuns lieux inconnus, non photographiés ou non cartographiés. C’est un fait historique et réellement fantastique. Mais dans le même temps, et sans s’en rendre compte, les Hommes venaient de perdre leurs innocences des zones inconnues et inexplorées. Il n’y aura plus jamais d’explorateurs… Nous, notre génération, étions la dernière génération à pouvoir explorer… tout ce qui est maintenant connu… nous avons à jamais perdu la magie qui animait ces explorations.

Au-delà de ce qui est irréversible, je pense qu’en réalité, ce qui a changé c’est la définition du mot « explorer ». J’ai étudié les mathématiques et je suis un explorateur de toujours. Tous les jours, j’écris des équations et je les pousse à leurs limites, j’explore les limites de mes connaissances en mathématiques et ainsi je découvre de nouveaux lieux. Bien sûr, ce ne sont pas des lieux physiques, mais c’est une exploration ! Les humains sont tous des explorateurs et nous le serons aussi !!!

Pour conclure, il est bien et mal de donner un nom à une montagne. Dans tous les cas, c’est un acte très fort et chargé d’émotions qui vont au-delà de nous-même. Nous devons aussi bien choisir, et de façon responsable, comment nommer une montagne. Cet acte ne doit en aucun cas devenir quelque chose d’anodin et de quotidien. 

Diego Vallmitjana

Crédits photos : Diego Vallmitjana 

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