Interview : Giovanni Quirici revient sur Yeah Man

Assez peu connu du grand public, le discret grimpeur suisse Giovanni Quirici n’en reste pas moins très talentueux. Véritable globe trotter, il sillonne le Monde depuis plusieurs années pour grimper. Il vient courant août de réaliser chez lui la première ascension d’un de ses projets des Gastlosen, ‘Yeah Man’, 8b+, 9 longueurs, 340 mètres. Retour sur cette première et portrait.


Les photos qui accompagnent sont l’oeuvre d’Evrard Wendenbaum. Rajoutons qu’Evrard est en train de réaliser un documentaire sur cette voie. Le trailer est visible ici.



 – Kairn : Où se situe exactement ‘Yeah man’, décris un peu l’ambiance de la voie et du massif, les Gastlosen ?
– Giovanni :
La Gruyère ressemble à un compte de fée, il y a des vaches qui se promènent tranquillement et parfois un cor des alpes résonne dans la vallée. Pour l’ambiance il suffit de regarder vers le sol depuis le 8b+ pour respirer du pur vide. ‘Yeah man’ parcourt comme une ligne droite le centre de la face nord du Grand Pfad reconnue aussi pour être la face la plus exigeante des Gastlosen. Surnommée aussi les petites Dolomites suisses, cette chaîne de pics de 400 mètres de haut et 15 km de long fascine par sa silhouette inoubliable.




– Kairn : Toi qui es plus attiré par les voyages d’habitude, qu’est ce qui t’as motivé à essayer ce projet dans ton pays ? Est-ce toi qui as ouvert la voie ?
– Giovanni :
La voie a été ouverte par François Studenmann et Guy Sherrer. Ils ont Commencé à équiper en 1995, ils ont terminé le boulot en 1998. Ce qui m’a poussé a m’investir dans cette voie c’est surtout la ligne, le cadre et les rencontres. Dès la première rencontre, j’ai senti que ça pouvait être une belle histoire.




– Kairn : Comment est la voie ? Quel style d’escalade peut-on y trouver ?
– Giovanni :
C’est du calcaire d’excellente qualité! On trouve tous les styles, du devers à la dalle. Mais on évolue principalement dans un univers légèrement déversant sur petites prises.




– Kairn : la longueur clé est à la fin, en 8b+. Décris-la nous.
– Giovanni :
Effectivement, le 8b+ est l’avant dernière longueur, ce qui rend le travail et l’enchainement de la voie plus difficile. C’est un grand voyage de presque 50 mètres dans un mur gris-orange un peu verdonnesque. Une longueur de pure résistance avec quelques pas très techniques. Le crux est environ à 35 mètres : il faut bien placer la pointe du pied gauche, rester scotché à la paroi avec un mini renversé pour enfin attraper un petit bi doigt et se rétablir avec un bon renversé. Pendant l’enchaînement, j’ai senti qu’il fallait être dans un timing parfait vu que sur certaines prises le temps est compté.




– Kairn : Qu’en est-il des autres longueurs de l’itinéraire ?
– Giovanni :
La voie début avec un 7a+, puis un 7c avec une section bien physique. Ensuite il y un magnifique 7b+ suivi d’un autre 7c avec une sortie tenace. La cinquième longueur, un 8a+, est caractérisée par un pas bien bloc au début, et fini par une traversée sans pieds. Amon avis, un des plus beaux mouvements de la voie se trouve dans le 8a qui suit : un petit jeté sur pieds glissant, la classe! Arrivé à la fin de cette longueur on peu enfin se reposer vu qu’il a la seule belle vire de toute la voie. Avant le dure il y encore un 7c+ avec une sortie qui nécessite un bon blocage du bras droit. Après le 8b+, la voie arrive au sommet avec un 7a délicat.




– Kairn : En 2004, Rikardo Otegui et Josune Bereciartu avaient libéré toutes les longueurs mais n’avait  pas réussi à enchaîner l’intégrale.Quelle difficulté pose cet enchaînement ?
– Giovanni :
Mis à part une grimpe très exigeante, la météo n’est pas toujours au rendez-vous, et vu qu’il faut se taper 300 mètres de jumar pour pouvoir essayer le 8b+, vous comprenez qu’il faut être très motivé !




– Kairn : Toi qui as voyagé dans pas mal de pays ces dernières années, quels sont ceux qui t’ont marqué, dont tu as les meilleurs souvenirs et pourquoi ?
– Giovanni :
L’ascension en libre du Pilier Ouest à la Tour du Trango reste sûrement un des plus beaux souvenirs. Parti avec de très bons amis, la chance nous a suivi tout le long. Je n’oublierai jamais les nuits passées dans cette paroi de légende, et notre retour au camp de base : la tente était entièrement ornée de fleurs ! C’était émouvant de voir que notre guide et cuisinier pakistanais nous avaient suivi avec le cœur !




– Kairn : Tu enchaînes chaque année quelques dates de conférences. Quel en est le contenu ?
Giovanni : Pendant mes soirées je présente à l’aide de diaporama aux films mes expéditions. J’aime beaucoup partager les expériences, et si à la fin d’une conférence j’ai pu transmettre à une personne l’envie de réaliser un rêve, je suis l’homme le plus heureux. Je crois que si chaque être humain écoutait plus son cœur, le monde irait surement beaucoup mieux.




– Kairn : Des projets pour le futur ?
– Giovanni :
Des projets j’en est toujours beaucoup, on verra ce qui se matérialise.


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