En plein débat sur l’organisation du travail, une Américaine de l’Arizona a préféré abandonner un salaire confortable plutôt que de renoncer à ses journées en télétravail. Après plusieurs mois passés à exercer depuis chez elle, la perspective de retrouver quotidiennement son bureau est devenue insoutenable. Son choix illustre le fossé croissant entre des dirigeants réticents et de nombreux employés convaincus des bénéfices du travail à distance.
En dépit d’un salaire confortable, elle quitte son emploi car elle ne peut plus télétravailler
Felicia, 53 ans, occupait un poste de cadre administrative dans une entreprise américaine. Installée en Arizona, elle avait négocié un rythme hybride : trois jours de télétravail et deux jours sur site chaque semaine. « Je me suis aperçue que j’accomplissais beaucoup plus lorsque je travaillais depuis chez moi », confie-t-elle. Dans son salon, entourée de ses deux enfants adolescents, elle bénéficiait d’un calme propice à la concentration. « Au bureau, j’étais constamment interrompue : réunions impromptues, collègues qui passent la tête dans mon bureau… Au final, je rentrais souvent pour terminer des tâches que je n’avais pas pu finir dans la journée. »
Au fil des mois, cette organisation est devenue le pivot de sa vie : elle gérait ses rendez-vous médicaux en milieu de journée, accompagnait ses enfants à leurs activités extrascolaires et évitait les heures de pointe sur l’autoroute. « Je n’ai jamais eu l’impression de travailler moins, au contraire », souligne Felicia. Pourtant, lorsque la direction a décidé, à l’automne dernier, de remettre tous les salariés en présentiel cinq jours sur cinq, elle a dû se plier à cet impératif… à contrecœur.
Un matin, alors qu’elle se trouvait coincée dans un embouteillage interminable, elle réalise l’ampleur du compromis exigé. « J’étais assise dans ma voiture, en retard pour une réunion, et je me suis demandée : “Pourquoi est-ce que je m’inflige ça alors que je peux parfaitement remplir mes missions depuis chez moi ?” » Ce jour-là, elle a pris la décision de déposer sa démission, renonçant à un salaire supérieur à 100 000 dollars par an, soit environ 92 000 euros.

Elle a donc démissionné, renonçant ainsi à ses émoluments mirobolants
Le 15 janvier dernier, débordée par la circulation et frustrée par les contraintes du présentiel, Felicia a remis sa lettre de démission. Elle se souvient encore de la tête de son supérieur direct quand elle lui a expliqué qu’elle n’était plus disposée à franchir chaque matin les portes de l’entreprise. « Je savais faire mon travail sans même mettre un pied dans un bureau », a-t-elle précisé lors d’un échange informel avec des collègues. Une position radicale, mais représentative d’un malaise ressenti par de nombreux salariés depuis la crise sanitaire de 2020.
Aujourd’hui, elle recherche un poste offrant au moins trois jours de télétravail par semaine, afin de préserver sa qualité de vie. « Pour moi, c’est une question d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée », explique-t-elle. Comme des milliers d’autres employés, elle a pris conscience qu’une fois habitués à travailler chez eux, il est difficile de revenir à un modèle strictement présentiel.
Cette situation est symptomatique d’une réticence persistante chez certains dirigeants. Selon une étude de Microsoft publiée en septembre 2022, 87 % des salariés se sentent plus productifs chez eux, tandis que 85 % des employeurs avouent avoir du mal à faire confiance à leurs équipes en télétravail. Ce déséquilibre a d’ailleurs donné naissance au terme de « paranoïa de productivité », popularisé par Satya Nadella, PDG de Microsoft, pour décrire la tendance des managers à surveiller excessivement leurs collaborateurs à distance, souvent au détriment de leur véritable performance.
En France, le phénomène n’est pas en reste : selon l’INSEE, 36 % des salariés qui peuvent télétravailler le faisaient régulièrement en 2022, contre seulement 25 % en 2017. Durant la pandémie, ce chiffre avait même franchi les 40 %. Pourtant, de nombreuses entreprises rechignent encore à pérenniser cette organisation, invoquant la crainte d’une baisse d’engagement et d’un manque de cohésion d’équipe.

Pour Felicia comme pour beaucoup d’autres, l’expérience du télétravail a révélé que l’épanouissement professionnel ne passe pas forcément par un bureau fermé. Bien au contraire, une flexibilité accrue s’accompagne souvent d’une meilleure motivation, d’une concentration renforcée et d’une réduction significative du stress lié aux déplacements. À ses yeux, renoncer à ces avantages pour un poste mieux rémunéré au cœur d’urbaines bouchées n’était tout simplement plus envisageable.
Pour 100000 dollars par an (même si c’est brut) ça doit quand même faire plus de 5000 nets voire plus, je veux bien bosser six jours sur sept et même 15h par jour. Comme quoi… Actuellement je fais des doubles journées et je suis loin de gagner ce que Madame dédaigne. Les gens ne sont plus jamais contents