Cet été, le portugais Leopold Faria a décidé d’aller explorer un potentiel big wall au Pakistan, avec trois amis : Rui Rosado, Ana Silva et Bruno Gaspar. Voici le récit d’une expédition menée dans la douleur dans un pays dévasté où l’équipe a ouvert ‘Off-dido’ , 7a+, 550m, au Babar Wall dans la vallée de Nangmah.
Nous sommes partis pour un mois et demi d’expédition. Et ce que nous ignorions, c’est que le plus dur serait de se rendre en montagne. En raison des inondations sans précédent qui ont causé un grand désastre dans tout le Pakistan, provoquant un chaos total avec plusieurs milliers de personnes disparues, notre équipe a été bloquée à Islamabad avec aucune marche de manoeuvre. La route de Skardu (ville qui se connecte avec les montagnes du Karakorum) a été fermée car partiellement détruite par des chutes de pierre. Les avions étaient cloués au sol à cause du mauvais temps, donc notre seule occasion pour s’en sortir a été de louer une jeep et de partir dans une grande aventure pour arriver à Skardu. Après 3 jours de conduite difficile et de nombreuses embûches, nous avons finalement réussi à rallier Skardu. 5 heures de jeep plus tard, nous voici enfin arrivés à Kanday pour commencer le trekking au camp de base “Brakk Amin”. Malheureusement, une partie de la route menant à Kanday a été aussi endommagée, nous rajoutant 6 heures de plus de randonnée ! Nous avons vu beaucoup de maisons détruites à cause de chutes de pierre qui ont anéanti certains villages. Même si nous avions amené des fournitures pour les populations locales, nous nous sommes sentís impuissants face à cette situation dramatique…
Notre objectif initial du voyage était de grimper dans la vallée de Charakusa. Mais la situation actuelle nous a privé de temps, et nous avons été obligés de changer nos plans pour une destination plus proche. Nous avons donc choisi d’explorer la belle vallée Nangmah. Cette vallée très verdoyante a encore un grand potentiel avec de nombreuses possibilités pour de nouvelles voies. Après une exploration des murs autour de notre camp de base, nous avons repéré une fissure sur un beau big wall resté vierge près de Amin Brakk.
L’escalade en haute altitude (près de 5000m) n’a pas été facile et tenter des itinéraires en escalade libre n’était pas vraiment du gateau. Nous avons trouvé de nombreuses fissures remplies de plantes et de terre qui nous ont obligé à effectuer quelques séances de nettoyage afin degrimper. En dehors de cela, nous avons pu profiter de quelques fissures de très bonne qualité, beaucoup d’offwidths ajoutant une certaine émotion !
Après 4 jours d’efforts, alors que nous étions sur un terrain facile à deux longueurs du sommet, quand soudainement une petite prise rompit sous mes doigts. La seule chose dont je me souviens c’est que que j’ai filé dans les airs. Il s’agissait d’une simple dalle sans aucune possibilité de protection. Après 12 mètres de chute, je me suis crashé contre une petite vire, me cassant le poignet et me rompant au passage les ligaments du pied. Cela m’a ensuite pris 4 heures dans d’atroces douleurs pour rejoindre le sol.
Malgré un terrain très facile, nous sommes satisfaits d’avoir été au sommet de ce mur. Malgré toutes les situations difficiles que nous avons vécu, nous sommes heureux de nous être rendus au Pakistan cette année et très fiers de la voie que nous avons ouvert, ce qui est très probablement la première ascension de ce mur, que nous appelons “Babar” en l’honneur de notre cuisinière, Altaf. Une pensée pour elle.