A 38 ans, Ueli Steck est l’un des plus grands alpinistes actuels.
Le 10 octobre 2013, il marque encore l’histoire de l’alpinisme avec la réalisation en solitaire de la face sud de l’Annapurna en un temps record de 28 heures.
Publié pour la première fois en Français, Ueli livre dans « Speed » récits et exploits qui permettent d’approcher ce personnage hors norme !
Sa devise : « Tout ce que je peux imaginer peut devenir possible ».
Le livre
Ueli Steck est un phénomène.
Sa conception originale de la pratique de la montagne, fondée sur la performance sportive associée à une technique totalement maîtrisée, l’a propulsé au rang de « grimpeur le plus rapide du monde ».
Un titre acquis à la suite de son ascension de l’Eiger en 2 heures et 47 minutes. Une face nord qui avait été réalisée, en 1938 en 4 jours…
Ueli Steck est un alpiniste hors norme. L’une de ses réalisations les plus spectaculaires jusqu’à aujourd’hui fut l’enchaînement en 2009 de la trilogie des trois grandes faces nord classiques : c’est-à-dire l’Eiger, les Grandes Jorasses et le Cervin en seulement sept heures d’ascension cumulée. Un temps incroyable sur des parcours qui représentaient, il n’y a pas si longtemps, le must de la diffculté glaciaire et rocheuse dans les Alpes.
Dans ses récits saisissants et ses conversations personnelles avec les alpinistes légendaires, Walter Bonatti, Reinhold Messner et Christophe Proft, Ueli Steck nous ouvre le monde fascinant de ses exploits défnitivement hors normes.
Extrait
La voie se poursuit en ligne droite jusqu’au Bivouac de la mort. Je suis à mi-chemin, je prends le temps de manger ma barre énergétique que je noie dans un demi-litre de boisson.
Mais, en buvant trop rapidement, le liquide poisseux jaillit sur mon anorak et gèle instantanément. Splendide.
J’attaque la Rampe via le Troisième Névé. J’ai l’impression de tenir un bon rythme et espère que la cheminée de la Cascade ne sera pas remplie de neige.
Mais l’appréhension est inutile, la montagne se montre sous son jour le plus favorable. Je grimpe le deuxième passage clé exactement de la même façon que sur le croquis que j’ai esquissé en été, en partant de la vire en ligne droite vers la cheminée se déportant vers la gauche. J’essaie de caler ma jambe droite aussi longtemps que possible dans la cheminée tandis que je pose mon pied gauche sur des prises dans la paroi de gauche. Quant aux piolets, dans un premier temps, je les cale également dans la cheminée.
La longueur se compose d’une suite de prises que j’ai mémorisées. Sentiment de contrôle absolu. J’ai l’impression de faire partie de cette paroi. Le temps n’existe plus. Je ne pense ni à l’heure, ni au record. Je grimpe, c’est tout.
Avec mes piolets, je suis déjà parvenu au-delà du surplomb fnal, au-dessus de la cheminée. La pointe de mon piolet droit, que j’ai aiguisée comme une lame de couteau, se plante dans une petite réglette. Quant à mon piolet gauche, j’essaie de l’ancrer dans la glace. Je dois tendre le bras en veillant à ne pas modifer l’angle de mes crampons. Même si je ne peux pas voir mes pieds, je sais exactement comment ils sont positionnés sur les prises. Si je me redressais trop, les pointes avant de mes crampons décrocheraient.
En dosant ma force, je frappe aussi haut que possible dans la glace à un endroit me araissant digne de confance. La pointe ne s’enfonce que sur un centimètre.
De peur que la glace ne cède, je m’abstiens de frapper une seconde fois. J’observe attentivement la pointe tout en me suspendant à mon bras gauche.
Rien ne se passe.
La couche de glace est mince, environ trois centimètres d’après moi, mais elle est capable de porter le poids de mon corps.
Je me hisse à la force de mon bras gauche, la main agrippée au piolet, retire mon piolet droit pour le planter plus haut dans la glace.
Cette dernière est plus épaisse, retenant fermement le piolet.
Je respire profondément et me hisse pour positionner mes pieds plus haut et amener mon corps par-dessus le surplomb. En hiver, cet endroit est plus facile qu’en été, car les piolets offrent une meilleure tenue dans la glace que les doigts sur les prises fuyantes.
Me voilà de retour dans la glace, où je peux accélérer. J’atteins rapidement la fin de la Rampe. Grisé par la vitesse, j’ai failli manquer le passage de la Vire pourrie menant à la Fissure du même nom, avec une vue plongeante sur le précipice. Mais celui-ci ne me semble pas menaçant. Je me tiens solidement aux prises. La crainte de tomber ne m’effeure à aucun moment. Pourquoi en serait-il autrement ? Je ne suis pas las de vivre, au contraire, je tiens plus que jamais à la vie. Ces prises, que je ne lâcherai pas, me donnent l’assurance de ne pas chuter.
Speed
Ueli Steck
! Petite collection
Editions Guerin
! Environ 352 pages
9 photos
12 x 17 cm
Prix : 14 €
Préface d’Antoine Chandellier.
Disponible le 6 mars 2014 en librairie