Jeudi matin à Pierrefitte Nestalas s’ouvriront les 3èmes Rencontres pyrénéennes des territoires et des savoirs sur le thème : « Au fil du lait ».
Thème original qui doit nous faire rappeler que les Pyrénées ne produisent pas que de l’agneau, du mouton ou du veau sous la mère mais aussi du lait et surtout du fromage, sans oublier, par le passé, le beurre.
Ces rencontres permettent de faire le lien entre le passé, l’histoire, et le présent et ses productions respectueuses des savoirs dans le respect des milieux transmis de génération en génération tout en sachant s’adapter aux contraintes du moment
Cette journée débutera par un tour d’horizon «du Moyen-Âge à aujourd’hui » avec Jean François LE NAIL, Directeur honoraire des Archives départementales des Hautes-Pyrénées. Lait, beurre, fromages sont « dès le Moyen-Âge, de très anciennes pratiques pyrénéennes ». Le sociolinguiste Bruno BESCHE COMMENGE poursuivra cet aspect historique pyrénéen en nous parlant « des « fruitières » sur le modèle des Alpes et du Jura » avec « la bascule du XIX° s. et les suites ». Il nous fera voyager en 1888 avec Lapparent « de fromage en fromage et d’estive en estive ». Il nous présentera les projets et réalisations avec leurs difficultés tout comme aujourd’hui : « L’intention est plus que louable : face aux très fortes oppositions générées par la politique forestière alors en œuvre, un petit groupe de forestiers dissidents, presque tous adeptes de l’école sociologique de Le Play, va chercher à prendre en compte les besoins du pastoralisme. Briot pour les Alpes en est la figure la plus connue. Dans les Pyrénées, dès la fin des années 1860, le garde général Calvet lance avec une grande énergie un projet de rénovation reposant sur la diffusion du modèle jurassien des « fruitières » à base de lait de vache… ». Il conclura par le 20ème siècle par les propos d’Adrien C., en juillet 73, dans la cabane de Casabède, un soir, après avoir fait un fromage… : « Les recherches que nous avons faites, que les anciens ont faites avant moi, ils me les ont passées, est-ce qu’il n’a pas fallu en avoir de la mémoire ?…//…. Ça c’est pas les ordinateurs qui nous l’ont enseigné. Ceux qui à moi m’ont enseigné tout ça, je ne sais pas mais … il me semble tout de même que … enfin ! Ça n’a aucune valeur, ça ne compte pas, mais ceux qui ont travaillé avant moi, ils avaient quand même bien trouvé une solution ! »
Belle leçon de modestie qui sera développée avant que l’Association des Chambres d’Agriculture des Pyrénées (ACAP) ne nous replonge dans la réalité du moment : « Aujourd’hui, renaissance à travers des formes, des produits et des circuits commerciaux variés ».
L’expérience des Picos de Europa
Les expériences locales diverses existent du Pays Basque à la Catalogne en passant par le Béarn, le Val d’Azun, la Barousse, le Couserans…. Mais pour avoir un regard extérieur, ce sera Luis Aurelio GONZALEZ PRIETO (1), Docteur de l’Université d’Oviedo et membre de l’Institut Royal d’Études Asturiennes qui nous présentera « El Sabor del Saber », la Saveur du Savoir : Picos de Europa, le cas du « Cabrales ». Une saveur originale que nous ne connaissons pas dans les Pyrénées françaises, à base de trois laits : vache, chèvre et brebis. http://es.wikipedia.org/wiki/Queso_de_Cabrales
Regard vers le monde
Une ouverture encore plus large de ces rencontres, une ouverture vers l’Afrique et la Tunisie avec la participation de Johann HUGUENIN et Tasnim JEMAA, du CIRAD – Département : Environnements et sociétés – Unité Mixte de Recherche : Systèmes d’élevage Méditerranéens et Tropicaux (SELMET), qui nous apporterons un éclairage sur la « diversité des élevages laitiers et terres de lait dans le monde » : « Par un regard porté sur l’élevage laitier à travers le monde (surtout tropical et méditerranéen) on perçoit un grande diversité d’écosystèmes valorisés par de nombreuses espèces animales (Bovin, Buffle, Caprin, Camelin, Equin, ovin, Yack). Le lait produit est porteur de cultures locales ayant ses spécificités (mode d’élevage et de traite, type de pâture, transformation du lait). En tous lieux le lait contribue à la structuration des territoires et favorise l’organisation des producteurs ». Et de nous laisser méditer sur ce proverbe Touareg : ‘L’eau, c’est la vie, mais le lait est l’âme du monde’.
Le terrain aujourd’hui
Un des buts de ces rencontres est de mettre en relation le passé, l’histoire des territoires et le présent, mais aussi la théorie avec des intellectuels et la pratique avec des acteurs des vallées.
Claude SOULAS, Directeur du Centre départemental de l’élevage ovin (CDEO) d’Ordiap (64) nous parlera de la sélection des races locales et de la politique d’appellation d’origine, les deux piliers de l’ancrage de la filière ovine sur le territoire des Pyrénées-Atlantiques.
Afin d’engager le débat, trois producteurs interviendront :
– Stéphane CHETRIT, producteur et président de la Foire au Fromage de Laruns, vallée d’Ossau.
– José Manuel MARCO « MARENGO », producteur en vallée de Roncal, Navarre, Espagne.
– Laurent ETCHEBARNE, jeune agriculteur, sous la marque Fromages du Val d’Azun-Pyrénées.
Un regard vers l’Espagne
Ces rencontres pyrénéennes se tournent vers le versant sud des Pyrénées. La conclusion sera faite par Federico FILLAT ESTAQUE de Instituto Pirenaico de Ecología à Jaca (Aragon). Une participation qui est peut-être une préfiguration de ce que pourrait-être les rencontres pyrénéennes dans le futur.
(1) Luis Aurelio Gonzalez Prieto est l’auteur de « El libro del Cabrales – El Sabor del Saber » : http://www.escabrales.com/blog/paulino-diaz-anton/309-acerca-del-quesu-de-cabrales-reflexiones-sobre-el-libro-el-sabor-del-saber.html Présentation en français : http://www.pyrenees-pireneus.com/Pastoralisme/Etudes-Rapports-Reflexions/2011-Loups-ou-fromage-Ensauvagement-Developpement-Economique-Ecologique-Cas-Cabrales-Asturies-Espagne.html
En savoir plus : http://www.aspp65.com/