Michelin et Salewa mettent la gomme !

Discussion autour de la semelle Michelin avec Ambrogio Merlo.

A un certain moment nous nous sommes aperçus d’un espace important et surtout d’un domaine où nous retrouvions une application technique pour avoir de la performance. Le domaine de la semelle technique dans l’histoire reste assez statique, malgré quelques nouveautés l’année passée. Michelin s’est aperçu qu’il pouvait en changer les codes. Michelin a choisi de travailler avec JV international. Cette société est à Vérone près du lac de Garde en Italie, elle est née en 2013 de la volonté de Michelin de développer une offre sur la semelle technique dans n’importe quel secteur. Vous pouvez voir un des fruits de notre collaboration sur ce salon Outdoor, mais nous avons travaillé et finalisé bien d’autres solutions, pour des sports indoor, la moto, du vélo, des sports d’hiver comme le snowboard…

JV International a donc la mission de transférer la technologie du monde du pneu à la semelle technique.

Le partenariat avec Salewa est donc une première incursion dans le monde de l’Outdoor et vous avez déjà dans votre sac à dos des solutions été ou hiver pour proposer des solutions dans chaque secteur ?

Absolument ! Dans notre sac à dos nous avons des idées et des brevets qui arrivent du monde du pneu. Notre mission est d’adapter toutes ces nouvelles technologies au monde de la semelle technique. Nous présenterons d’ailleurs à Bike Expo deux nouvelles semelles développées pour North Wave dans le monde du VTT.

Nous avons aussi développé, mais exclusivement sur le marché nord-américain, une semelle pour la marque Under Armour, une semelle qui fonctionne vraiment comme un pneu. Une semelle qui s’adapte au terrain, à l’intérieur un matériau innovant qui a les mêmes caractéristiques que l’air ! Cette technologie vient de pneus utilisés en rallye pour éviter au maximum les crevaisons.

Nous allons beaucoup plus loin que le sport dans nos semelles, nous avons mis en place avec un cahier des charges extrêmement complexe, une semelle pour les plateformes pétrolifères. Cette semelle doit adhérer au sol malgré la présence en permanence de substances très glissantes et ce par des températures pouvant aller de -40° C à + 50°C !!

La durée moyenne de développement d’un projet est de 18 à 24 mois, nous n’avons commencé qu’en milieu d’année 2013, nous avons devant nous nos premiers développements produits. Nous ne désirons pas réduire ce délai, notre objectif est de proposer un produit fini et surtout d’une très haute technicité, les étapes du prototypage et des essais sont dès lors très importantes, seuls les produits adoptés par 100% des essais pourront être mis en production. Le consommateur pourra utiliser notre semelle entre 24 à 36 mois après le démarrage du projet !

Vous avez donc déjà la vision de ce que sera le partenariat avec Salewa sur l’hiver 2016-2017 et les saisons d’après ?

Oui bien sûr.

Nous avions eu un préambule de collaboration entre Eider et Goodyear qui n’avait pas été plus loin. Nous retrouvons à coté de votre collaboration, la marque Continental qui développe des semelles pour Adidas.

Attention, les marques Goodyear et Continental sont des licences de marques de pneus données à des marques de chaussures. Michelin ne donne pas de licence de marque à Salewa, ni à personne d’autres. Nous mettons en place un projet avec notre partenaire. C’est un projet que nous démarrons ensemble sur un brief produit, et nous faisons la Co-projection de notre chaussure. Nous apportons nos connaissances dans le domaine de la semelle et l’équipe Salewa son savoir-faire sur la tige de la chaussure. Ce premier travail génère un prototype qui sera testé séparément par les équipes JV International et Salewa. Dès le retour du test nous mettons en commun nos résultats, il peut arriver que nous soyons dans l’obligation de modifier le projet pour l’adapter dans un souci de performance … Par ces étapes nous arriverons à un prototype final et ce n’est qu’à partir de là que nous pourrons passer à la phase de mise en série. Pour arriver à cette haute technicité, JV International a acheté les meilleurs producteurs de semelles techniques en Chine et développé un centre de recherche sur la semelle.

Ce qui veut dire que nous retrouverons de plus en plus de semelles Michelin dans le monde de l’Outdoor ? Et ce malgré l’hégémonie Vibram.

Comme vous l’avez bien noté, l’Outdoor connait une hégémonie Vibram, parce que c’est la seule marque qui arrive à innover ! Nos recherches ne se cantonnent pas uniquement au domaine de l’Outdoor ! Mais nous avançons aussi dans cet environnement sportif et d’autres partenariats vont éclore assez rapidement avec d’autres marques du secteur Outdoor. Notre exigence est d’être présents là où le consommateur final a besoin d’une semelle technique. Par exemple nous présenterons à la rentrée en septembre une semelle spécifique à la restauration, où il y a une exigence de sécurité avec de la graisse en permanence au sol ainsi que du confort !

Regardons la semelle Salewa de plus près. La semelle a été conçue comme un pneu de moto cross, le dessin des crampons s’ouvre pendant la marche, cette flexibilité permet de nettoyer la semelle pendant le déplacement. Même testée dans des conditions extrêmes de boue, les résultats ont été très intéressants. Ceci permet de conserver l’accroche optimale de la chaussure quel que soit le terrain traversé ! Nous retrouvons aussi 2 types de crampons différents, des crampons qui vont développer l’accroche lorsque vous montez en dévers ou en instabilité, et des crampons qui vont accrocher lors de la poussée, ces 2 types de crampons sont au contact du sol en même temps et apportent la stabilité et la sécurité dont vous avez besoin lors de passages techniques.

Pour Salewa il a fallu répondre à plusieurs questions :

– La sécurité du consommateur

– Le problème du confort

– L’absorbtion d’énergie, on veut de l’amorti mais ne pas perdre en performance ! Joli dilemme !

– Le grip en montée et descente !

– Le problème de l’usure ! Une chaussure doit s’user de façon homogène. Nous faisons des tests de durée pour bien appréhender notre produit dans le temps. Peu de sociétés font ces tests sur la longévité, ce sont les plus contraignants, ils peuvent nous obliger à revenir presque à la case départ du projet !

Pour nous, une semelle de mountain training ne peut pas être usée de plus de 50% sur toutes les parties après 600km, sinon on risque de perdre en performance.

Juste un mot sur la production, nous avons choisi d’avoir notre propre production de semelles mais il peut arriver que nous soyons orientés vers un autre producteur qui aura un niveau de performance plus important afin d’obtenir un meilleur résultat que nous. Il est certes important d’avoir les bons dessins pour la semelle, mais si la gomme ne maitrise pas tous les paramètres de températures, de terrain et d’autres, alors votre résultat sera décevant. De ce fait nous n’hésitons pas à faire appel à d’autres sociétés lorsque celles-ci proposent un produit qui correspond exactement à nos recherches.

Une semelle semble être un produit très banal, pourtant c’est extrêmement complexe.

Quel plaisir a été ce moment partagé avec Ambrogio, tant sa passion est communicative. Bientôt un test sur le terrain.

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