Pots de yaourt : l’impossible recyclage

Chaque Français jette en moyenne 225 pots de yaourt par an, soit près de 15 milliards de contenants à gérer pour nos collectivités¹. Pourtant, une fois vidés et jetés dans le bac de tri, ces petits godets colorés restent un casse-tête. Faut-il vraiment conserver le polystyrène, plastique léger et fragile, ou basculer vers un recyclage chimique encore balbutiant ? Entre fausses promesses et solutions de repli, le bilan reste mitigé.

Un matériau peu dégradable

La magie du polystyrène, c’est d’être à la fois robuste et… trop friable. En broyant ces pots, on obtient un nuage de micro-fragments prêts à s’envoler. « Plus la matière est malmenée, plus elle se morcelle », explique Henri Bourgeois-Costa de la Fondation Tara Océan. Résultat : seuls 5 % de ces pots trouvent une seconde vie dans des cintres jetables ou des jardinières bon marché², le reste finissant majoritairement en incinération ou en décharge.

Cet été, un bénévole de Surfrider Foundation France a ramassé plusieurs poignées de poussière blanche sur une plage du Bassin d’Arcachon, résidu de polystyrène issu de vieux emballages : « On ne voit pas ces particules à l’œil nu, mais elles étouffent la vie marine », alerte l’ONG.

Le polystyrène non-recyclable est réautorisé

En juin 2021, fabricants et distributeurs avaient signé une charte pour lancer une filière de recyclage en boucle fermée : pots de yaourt retransformés en pots de yaourt. Mais, face aux coûts astronomiques et aux normes fluctuantes, le gouvernement a décidé en juin 2024 de reporter l’interdiction initialement prévue au 1ᵉʳ janvier 2025, permettant de nouveau la mise sur le marché de pots en polystyrène non-recyclable.

Pour pallier ce manque, Citeo travaille depuis 2020 à un recyclage chimique via pyrolyse, avec l’usine d’Indaver à Anvers, qui devrait traiter 8 000 tonnes de polystyrène par an, contre 60 000 tonnes consommées chaque année en France³. Mais ce gabarit reste modeste face au défi de masse.

Une longue liste de polluants

Aux États-Unis, le recyclage chimique des emballages plastiques s’est développé depuis plusieurs années, mais il laisse une empreinte toxique. Les procédés libèrent notamment des hydrocarbures aromatiques polycycliques, des dioxines et des métaux lourds, et plusieurs usines sont classées « gros producteurs de déchets dangereux » par l’EPA.

Début février 2025, la Commission européenne a autorisé un régime d’aides d’État de 500 millions d’euros pour soutenir le recyclage chimique des plastiques, tandis que le Conseil de planification de l’écologie prépare un vaste plan d’action intégrant éco-conception et réemploi. Mais derrière ces annonces, le mirage d’une filière propre demeure entier.

Notes de bas de page

  1. Que Choisir; https://www.quechoisir.org/actualite-pots-de-yaourt-enfin-recycles-n165420/
  2. Le Dauphiné, “Poubelle jaune ou ménagère ? Le recyclage des pots de yaourts, un casse-tête”; https://www.ledauphine.com/environnement/2025/02/14/poubelle-jaune-ou-menagere-le-recyclage-des-pots-de-yaourts-un-casse-tete
  3. Indaver, “Plastics2Chemicals – Indaver”; https://indaver.com/services/plastics2chemicals

Laisser un commentaire

5 × 3 =