En préparant mes valises pour un reportage en Afrique du Sud, je me suis souvenu des récits de voyageurs évoquant un aéroport autrefois bouillonnant. Aujourd’hui, l’aéroport Louis-Botha de Durban est devenu le symbole d’une désolation inattendue : terminaux silencieux, pistes envahies par les herbes folles, vestiges d’un hub international transformé en ville fantôme.
Un géant aérien abandonné en Afrique du Sud
Inauguré en 1951, Louis-Botha a rapidement gravi les échelons pour devenir le troisième aéroport le plus fréquenté d’Afrique du Sud. Le saviez-vous ? En 2006–2007, il accueillait 4,26 millions de passagers¹. Pour autant, sa piste trop courte ne supportait ni les Boeing 747 ni les Airbus A340, freinant son expansion vers le long-courrier. Le 1ᵉʳ mai 2010, 41 jours avant la Coupe du monde, le King Shaka International ouvrait ses portes², reléguant Louis-Botha à une fermeture programmée.
Une transition mouvementée
Pendant la compétition mondiale, l’ancien aéroport servit brièvement de base pour l’armée de l’air et la police aérienne sud-africaine. J’ai rencontré un ex-pilote de l’armée de l’air qui m’a raconté comment les hangars résonnaient des échos de casques et de moteurs. Quelques mois plus tard, tout s’est arrêté : les pistes, abandonnées, furent doucement grignotées par la végétation, tandis que les bâtiments tombaient en ruine, victimes du temps et du vandalisme.
Des projets avortés et des scandales
En 2012, le site a été cédé à Transnet pour 1,85 milliard de rands (pour y construire un « dig-out port »)³. Cinq ans plus tard, un bail fut conclu avec Seaworld Aviation, promettant de redonner vie aux pistes et de convaincre des compagnies régionales de s’y poser. Mais des litiges contractuels et des soupçons de corruption stoppèrent net l’initiative. Aujourd’hui, aucun plan de réhabilitation ne fait l’unanimité, et le dossier reste enlisé dans les tribunaux.
Conséquences d’un abandon
Les hangars vidés ont été pillés, les murs éventrés, laissant place à une atmosphère étrange et désolée. Seule une petite portion du site est exploitée : Transnet y loue des emplacements pour le stockage de véhicules, transformant d’anciennes aires de stationnement en parkings à ciel ouvert. Les quelques rares ouvriers que j’ai croisés portaient des casques fluorescents, comme pour conjurer l’impression d’être au cœur d’un décor post-apocalyptique.
Le futur incertain de Louis-Botha
Sans repreneur crédible et toujours sous le poids d’affaires judiciaires, l’avenir de l’aéroport de Durban reste flou. Ce qui fut une porte d’entrée animée pour des millions de voyageurs est aujourd’hui un carnage architectural, figé dans l’oubli. Comme le souligne Philippe Schmit de la Mission régionale d’autorité environnementale, « il faut tout un projet d’envergure et une gouvernance claire pour redonner vie à un site de cette taille ».
Notes de bas de page
Durban International Airport – passagers 2006–07; https://en.wikipedia.org/wiki/List_of_South_African_airports_by_passenger_movements
- King Shaka International Airport – ouverture et historique; https://en.wikipedia.org/wiki/King_Shaka_International_Airport
- Transnet snaps up land in Durban for R1.85 bn; https://greeneconomy.media/transnet-snaps-up-land-in-durban/