La violente tempête qui a balayé l’Arctique en juillet a prématurément mis un terme à la poursuite de l’expédition.
Le vendredi 6 juillet, après trois années de préparation minutieuse et un voyage plein de rebondissements à travers le Canada pour rejoindre les rives de la mer de Beaufort, Anne Quéméré s’était élancée d’Inuvik pour rejoindre Tuktoyaktuk et entamer ainsi un nouveau grand chapitre de sa vie de navigatrice : l’expédition « Arctic Solar by Icade ».
« Pour mon départ, j’avais rêvé de jolies conditions météo, mais il faut savoir parfois se contenter de ce que la nature nous offre, et je suis donc partie sous une petite pluie fine, un ciel couvert et une température de 5 degrés » se remémore Anne Quéméré.
Bateau pris dans les glaces
Le lundi 16 juillet, après avoir longé la péninsule de Tuktoyaktuk et alors que le soleil fait enfin son apparition, le solar boat « Icade » est pris dans un labyrinthe de glaces. La navigatrice tente de slalomer entre elles, mais se retrouve très vite encerclée.
Sous la pression des blocs, l’hélice du moteur du bateau se casse. Anne Quéméré plonge alors dans une eau à 2 degrés pour la réparer… « A cet instant, l’horizon n’était qu’icebergs et plaques de banquise ! » raconte la navigatrice.
Plusieurs jours seront nécessaires pour se délivrer de l’emprise des glaces. Anne Quéméré doit alors traverser la Baie de Darnley, mais le soleil disparait à nouveau et une des quatre batteries du solar boat ne fonctionne plus suite à une défaillance technique. « J’appréhendais vraiment de traverser la Baie de Darnley et de ne pas avoir suffisamment d’autonomie pour arriver de l’autre côté : mais ça l’a fait ! ».
L’aventurière est éblouie par ce qui l’entoure. « C’était vraiment un voyage incroyable : des paysages absolument magiques et des rencontres insolites, notamment avec les grizzlis ! »
Un constat inquiétant en Arctique
Anne Quéméré l’a découvert dès les premiers jours de son aventure : l’été polaire n’aura pas lieu cette année en Arctique. « L’an dernier, à la même époque, les températures oscillaient entre 10 et 15 degrés. Cette année, nous étions autour de 0 degré…un été plutôt revigorant ! » explique la navigatrice. Outre cette météo exceptionnelle pour cette région du monde, l’érosion des côtes, observable au quotidien, est l’un des autres effets du changement climatique qu’Anne Quéméré a pu observer. « Beaucoup pensent là-bas que Tuktoyaktuk n’existera plus d’ici 10 ou 15 ans… ».
Elle échappe à la tempête grâce à un groupe de scientifiques
Fin juillet, Anne Quéméré s’apprête à quitter les Territoires du Nord-Ouest pour franchir les frontières du Nunavut, un territoire Inuit indépendant créé en avril 1999. A cet instant, la navigatrice espère toujours le retour du soleil pour recharger suffisamment les batteries du bateau. Mais, dans la nuit du 31 juillet, une violente tempête s’abat sur la côte…
Contrainte de faire escale, Anne Quéméré fait alors la rencontre d’une équipe de scientifiques canadiens. Face aux rafales de vent de plus en plus violentes, la navigatrice décide de les suivre dans leur avion en attendant la fin de la tempête.
Aujourd’hui encore, elle mesure à quel point cette rencontre fortuite, sur une côte désertique où il n’existe aucun havre où se réfugier, fut miraculeuse : « Je n’en reviens toujours pas d’avoir eu la chance incroyable de croiser cette petite équipe qui m’a récupérée au vol avant que l’expédition ne tourne au drame ! »
Cette décision fut en effet salutaire : à son retour sur la côte, Anne Quéméré constate que la tempête a tout balayé sur son passage. Le bateau, bien qu’ayant été solidement amarré, se trouve trop endommagé pour reprendre la route…. « Les vents de 47 noeuds (environ 90 km/h) et la mer déchainée avaient précipité le solar boat sur la grève, du côté de Clinton Point. »
Malgré la déception de ne pas avoir pu franchir le mythique Passage du Nord-Ouest, le parcours réalisé par le solar boat dans des conditions si extrêmes relèvent d’une prouesse aussi technique qu’humaine : « « Icade » a fait un petit pas de plus dans l’aventure arctique ! Ce fut une aventure extraordinaire et j’attends avec impatience de pouvoir écrire la suite de l’expédition Arctic Solar by Icade… 2019 »