La Chine franchit une étape décisive dans l’innovation énergétique en annonçant la construction de la toute première centrale nucléaire hybride fusion-fission, baptisée Xinghuo. Un projet d’envergure qui pourrait bien bouleverser l’industrie énergétique mondiale. Ce réacteur hybride pourrait être la clé pour répondre aux besoins énergétiques colossaux du pays, tout en réduisant son empreinte environnementale.
Fusion et fission : la solution énergétique hybride de la Chine
La fission nucléaire est la technologie qui alimente actuellement nos centrales nucléaires classiques. Elle repose sur la division de noyaux lourds, comme celui de l’uranium, pour libérer de l’énergie. En revanche, la fusion nucléaire est le processus qui se déroule au cœur du soleil : deux noyaux atomiques fusionnent pour former un noyau plus lourd, libérant une quantité d’énergie bien plus grande. Ce processus pourrait générer quatre fois plus d’énergie par kilogramme de combustible que la fission.
Le réacteur Xinghuo a l’ambition de combiner ces deux technologies, créant ainsi un cycle où les neutrons ultra-énergétiques générés par la fusion alimentent la fission, maximisant la production d’énergie tout en réduisant les déchets radioactifs. Un modèle innovant qui permettrait de tirer le maximum de chaque particule, tout en apportant un gain d’efficacité énergétique.
Un coût ambitieux pour une production modeste
Le projet Xinghuo, d’un coût de 2,5 milliards d’euros (environ 20 milliards de yuans), aura pour objectif de produire une puissance continue de 100 MW, l’équivalent d’une petite centrale nucléaire traditionnelle. Cependant, ce qui distingue Xinghuo, c’est son rendement. Avec un rapport Q supérieur à 30, il est bien au-delà des ambitions d’autres projets comme ITER en France, qui vise un Q de 10, ou des réacteurs américains qui atteignent un Q de 1,5. La Chine met donc la barre haut, avec un rendement sans précédent dans l’histoire de la fusion nucléaire.
Un site stratégique pour un projet révolutionnaire
Xinghuo sera construit sur l’île scientifique de Yaohu, dans la province de Jiangxi, un endroit stratégique où se concentrent des ressources en cuivre, essentiel pour les câbles supraconducteurs nécessaires au confinement du plasma. Ce choix de site n’est pas anodin, car la région possède des matériaux clés pour cette technologie de pointe.
Le projet est le fruit d’un partenariat entre China Nuclear Industry 23 Construction Corporation et la société privée Lianovation Superconductor, spécialisée dans les composants de précision. Ce travail collaboratif témoigne des ambitions de la Chine pour faire de ce réacteur un modèle d’innovation et d’efficacité.
Une étude d’impact environnemental avant tout lancement
Malgré son caractère innovant, Xinghuo doit d’abord passer l’étape de l’évaluation environnementale. Une étude d’impact vient d’être lancée, portant sur des aspects essentiels tels que la qualité de l’air, de l’eau, les émissions sonores et l’impact sur les écosystèmes locaux. Ce rapport inclura également un plan de gestion des risques et un suivi à long terme, une démarche qui témoigne du sérieux et de l’engagement de la Chine pour minimiser l’impact environnemental de ce projet à grande échelle.
Une avance stratégique sur ITER et ses concurrents
Si le calendrier est respecté, la Chine pourrait connecter son réacteur hybride au réseau électrique dès 2030. Un timing ambitieux, surtout lorsque l’on considère que le projet ITER en France, visant à produire de l’électricité par fusion, ne devrait pas voir le jour avant 2035. Ce réacteur hybride permettrait à la Chine de prendre une avantage stratégique significatif, renforçant ainsi sa position sur le marché de l’énergie.
Un tournant pour l’énergie nucléaire
Xinghuo n’est qu’une partie de la vision de la Chine en matière d’énergie. Le pays prévoit également de développer le China Fusion Engineering Test Reactor, une centrale de fusion pure, sans fission, pour les années 2030 à Hefei. Ce projet pourrait représenter une version plus pragmatique d’ITER, avec moins de bureaucratie et plus de réalisme.
En combinant fusion et fission, Xinghuo pourrait ouvrir une nouvelle voie vers une énergie nucléaire plus sûre, durable et potentiellement plus propre. Ce modèle énergétique hybride pourrait réduire considérablement les déchets radioactifs tout en produisant de l’énergie à des rendements inaccessibles pour les énergies renouvelables comme le solaire ou l’éolien.
La Chine, un acteur clé de la transition énergétique mondiale
L’ambition de la Chine ne s’arrête pas là. En tant que premier consommateur d’énergie mondial, le pays cherche à répondre à ses besoins croissants tout en réduisant sa dépendance aux énergies fossiles. D’ici 2025, la Chine prévoit d’atteindre une consommation de charbon maximale, avant de progressivement diminuer sa production grâce aux énergies renouvelables et au nucléaire. Le pays vise également la neutralité carbone d’ici 2060 et investit massivement dans des technologies telles que le stockage d’énergie et l’hydrogène vert.
En intégrant des réacteurs nucléaires hybrides, la Chine pourrait ainsi jouer un rôle de leader dans la transition énergétique, tout en réduisant son empreinte carbone. Cette révolution technologique pourrait non seulement transformer son secteur énergétique, mais aussi bouleverser les équilibres géopolitiques et économiques mondiaux.