Intuitions : naissance et reptations 2ème partie

La vie ne s’apprend pas que dans les livres, 2eme partie

Le sommet. La vue. Les accolades. La barre de céréale un peu durcie. La photo. La routine dont j’avais besoin.

– « Bon on descend les copains ? J’ai sept cents bornes à faire. Vous ne trouvez pas que ça pue un peu là ?

-Ben je ne sais pas non, on a qu’à passer au fond du vallon.

-Je ne sais pas pourquoi je ne le sens pas. On reste rive droite au plus haut ? C’est moins expo et avec un peu de chance ça aura décaillé avec le soleil.

-De toute façon on est six et il y a de la place partout. »

Je ne le sens vraiment pas ce fond de vallon. Je suis mon instinct qui me dit d’aller au moins exposé, c’est-à-dire le plus haut possible, sur la rive droite. Je me dis que si une plaque part elle ne sera pas trop grosse et je garde la possibilité de m’échapper.

Je sens qu’au fond c’est le piège.

J’ai les skis qui me démangent sérieusement et je pars le premier. Je lâche tout de suite les watts et prends de la vitesse. Je ne m’arrête que quand les cuisses me brûlent et me retourne alors. Je vois les cinq copains en train de descendre avec des styles bien différents mais tous pas trop loin de mes traces quand un grondement terrible se fait entendre.

« Putain de merde c’est parti ! Putain c’est une avalanche de fond ! »

En voyant la scène, la première chose que je me dis c’est qu’on n’est pas du tout exposés. Nous sommes tous hypnotisés par la nature qui dévoile sa puissance sans prévenir ! Nous regardons les blocs de glace mélangés à de la terre, rouler lentement mais comme un rouleau compresseur. Le temps semble suspendu pendant presque une minute. Personne ne dit mot. De toute façon, que dire ?

Tandis que la coulée ralentit, nous reprenons nos esprits.

« Bon on reste pas là ? On s’arrache ? Ca sent l’embrouille ! »

Nous descendons au plus vite en restant bien à droite de la zone exposée. Nous contemplons la pente dévastée et les vestiges de la coulée. Nous apercevons tout ça d’assez loin. J’ai un arrière goût bizarre dans la bouche et ça n’a rien à voir avec le petit déjeuner. J’ai l’impression de mater un accident sur l’autoroute, vous savez quand les gens ralentissent pour regarder. Il y a presque un côté macabre dans cette scène. Pourtant tout va bien. Personne n’est blessé et nous étions suffisamment loin de la coulée pour nous sentir en sécurité. Mais tout de même.

Pour arriver en bas du couloir, nous continuons de longer sa rive droite qui s’évase peu à peu. Soudainement une deuxième plaque se décroche sous le sommet, exactement à l’endroit où nous avons entamé la descente

L’avalanche est partie de la même manière que la première mais de plus haut et en plus large. Elle a totalement recouvert la précédente.

Pourtant sur le papier on croyait franchement au risque zéro !

Nous arrivons tous au parking et nous faisons comme si rien ne s’était passé. Chacun se change et parle matos, on mange un morceau et on se réhydrate un peu. Je vois bien que nous sommes tous pensifs et qu’il est un peu trop tôt pour débattre de cette descente. Ce qui me passe par la tête c’est que si mon instinct m’a dit de ne pas me jeter dans la gueule du loup, c’est que nous avions dû croiser des signes alarmants.

La reptation de la neige peut avoir pour effets l’arrachement de matériaux du versant, le lissage des versants ou encore la formation de griffures dans la pente. Cependant ce phénomène intervient la plupart du temps au printemps.

En écrivant ces quelques lignes tout me semble plus clair. Malgré toutes les théories apprises dans les bouquins, ce jour là nous avons croisé des signes qui laissaient présager ces avalanches. L’autre détail que nous avions négligé est que la saison 2011 2012 à tardé à se mettre en route. Il ne s’est mit à neiger qu’à partir du 15 décembre sur un terrain chaud et sec. Et du jour au lendemain les chutes de neiges ont été faramineuses ! Ce qui à entrainé des avalanches de fond un peu partout dans les alpes tout au long de la saison.

Comme promis je suis arrivé à 22h à la maison et j’ai retrouvé ma femme avec un immense bonheur. Quand à Anna elle a prit gout au sommeil depuis et nous comble de bonheur. C’est complètement addictif ces petites choses…

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