Le GMHM dans la tourmente au Shishapangma

Aux chutes de neige conséquentes des derniers jours s’ajoute un fort vent de Nord. Les températures chutent au Camp de Base et l’automne semble s’installer sur le Tibet. Panaches et rouleaux alternent au sommet du Shisha. Dans les pentes Sud du Pungpa Ri, épaule du 8000 tant convoité, les départs de plaques de neige froide sont impressionnants.

Mardi 8 octobre, vers 6h du matin j’entends des bruits de pièces métalliques et de plastique s’entrechoquer. Yan nous avait annoncé un fort vent en altitude, mais nous ne nous attendions pas aux violentes bourrasques de vent qui, cette nuit au camp de base, ont plié nos tentes au point que leurs toits nous frôlent parfois le visage. Un peu inquiet pour nos affaires, je m’extirpe de la chaleur du sac de couchage. Une fois dehors, j’inspecte le camp dans le halo de ma frontale. Tout parait en bon ordre. Puis soudain, alors que j’émerge de mon demi-sommeil, je réalise que notre grosse tente dôme a non seulement changé de place mais qu’elle est également à l’envers. Elle était pourtant lourdement lestée de tout notre matériel collectif : caisses médicales, informatique, valise satellite, matériel photo et vidéo, nourriture, matériel d’alpinisme, etc.
Je vais rapidement constater les dégâts. Le spectacle à l’intérieur de la tente est triste à voir. La tente a parcouru une vingtaine de mètres et a été stoppée dans sa course par les drapeaux à prières qui sont tendus entre la tente cuisine et la tente mess. Je m’assure que la tente ne risque pas de partir plus loin et je retourne me coucher. Dans deux heures il fera jour et plus rien ne presse pour remettre la tente en ordre.

En me glissant dans mon duvet, je pense à l’adjudant Sébastien Moatti et au chasseur Max Bonniot qui bivouaquent au camp de base avancé avec pour projet de partir ce matin tenter l’ascension du Sursun Ri (nommé Triangle Peak dans le livre des anglais Scott, Mc Intyre et Baxter-Jones).

Dès les premières lueurs du jour, nous nous attelons à remettre de l’ordre dans les dégâts de la nuit. Finalement, il y a moins de casse que ce que l’on aurait pu le croire. Les panneaux solaires fixés sur la tente ne sont pas trop endommagés et fonctionnent encore, le plus gros problème semble venir du BGAN (valise satellite) dont le câble d’antenne a été arraché des deux côtés. Heureusement, Didier vient à bout de ce problème dans la matinée.

Vers 12H30, comme prévu la veille, Didier, Arnaud, Antoine et Sébastien Bohin quittent le camp de base pour Nyalam où il est prévu qu’ils passent quelques nuits pour se refaire une santé après ce long séjour que nous venons déjà de faire en altitude. Notre camp de base est à 5300m et y séjourner fatigue les organismes.

Au camp de base nous restons en effectif restreint afin d’assurer le suivi de la cordée Moatti-Bonniot : notre cuisinier népalais et son aide tibétain, le docteur Valentine Malavoy, le commandant Jean-Yves Igonenc et moi. Nous suivons régulièrement leur progression à la jumelle et vers 16h, nous recevons un appel téléphonique de leur part. Ils sont à mi-hauteur de l’ascension, au pied de la partie neigeuse, et installent leur bivouac. Ils comptent atteindre le sommet demain.

Un peu plus tard nous avons le capitaine Didier Jourdain au téléphone. Ils sont bien arrivés à Nyalam.

Tout va bien.

Au camp de base, nous passons la journée du mercredi 9 à scruter Triangle Peak où la cordée Moatti-Bonniot évolue avec rapidité et efficacité vers le sommet. Alors que les forts vents d’altitude font, au Shishapangma, un panache de plus d’un kilomètre, eux semblent épargnés par l’orientation de leur face et la moindre altitude du Triangle Peak. Vers 14h, nous avons le plaisir de les voir franchir la corniche sommitale et 30 minutes plus tard nous recevons leur appel téléphonique : ils sont au sommet ! Nous sommes heureux pour eux et nous les félicitons chaudement.

Toujours à l’affût, nous les observons de retour à leur bivouac du matin vers 17h. Ils n’ont pas traîné dans la descente mais ils ont visiblement décidé de redormir là ce soir. Ils doivent être bien fatigués, ce dont nous n’aurons pas la confirmation par téléphone car les lois de la communication satellitaire sont parfois capricieuses.

Nous joignons cependant l’équipe de Nyalam à laquelle nous annonçons la bonne nouvelle et qui nous demande de transmettre à Seb et Max leurs félicitations pour cette belle ascension dès que nous arriverons à les joindre.
Jeudi 10, Sébastien et Max arrivent au camp de base vers 14h. Nous déjeunons ensemble en écoutant le récit de leur ascension. Suit un après-midi de farniente bien mérité pour eux et un peu moins pour nous.

Le soir nous avons la liaison avec l’équipe de Nyalam qui nous confirme leur remontée au camp de base pour le lendemain.

Capitaine Lionel Albrieux

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