Une équipe népalaise a réussi ce samedi la première ascension hivernale du K2, le deuxième plus haut sommet de la planète (8.611 m) et le seul « 8.000 » qui n’avait encore jamais été gravi en hiver, indique l’AFP.
Cette réussite marque la fin de l’un des derniers grands mythes de l’alpinisme.
« Nous sommes fiers d’avoir pris part à l’histoire de l’humanité et de montrer que collaboration, travail d’équipe et une attitude mentale positive permettent de repousser les limites de ce que nous pensons être possible », a déclaré sur son compte Instagram Nirmal Purja, qui faisait partie de l’expédition.
Geste nationale pour le Népal, en terre pakistanaise
Cet ancien soldat des forces spéciales britanniques, Nirmal Purja, avait déjà gravi en 2019 les quatorze « 8.000 », avec oxygène, en six mois et six jours. Et accompli avant d’autres exploits.
Il était le leader de cette équipe nationale avec Mingma Gyalje Sherpa, une autre star de l’alpinisme népalais.
Les dix Népalais se sont rassemblés juste sous le sommet du K2, situé dans le massif du Karakoram et réputé comme l’une des montagnes les plus dangereuses au monde, pour gravir ensemble les derniers mètres en chantant l’hymne national et y planter le drapeau de leur pays.
Une poignée d’expéditions avaient tenté l’ascension hivernale, depuis la première en 1987-1988
Connus depuis des décennies pour leur aptitude à la haute montagne, les Népalais n’avaient encore jamais placé le moindre grimpeur sur une première ascension hivernale d’un sommet de plus de 8.000 m, une spécialité longtemps restée la chasse gardée des Polonais.
Cône minéral aux lignes élégantes, perdu aux confins du Pakistan, à la frontière avec la Chine, le K2 était le dernier « 8.000 » à résister aux efforts de l’homme en hiver. Il avait été conquis pour la première fois (en été) en 1954 par les Italiens Lino Lacedelli et Achille Compagnoni.
Une poignée d’expéditions avaient tenté l’ascension hivernale, depuis la première en 1987-1988. Mais personne n’était encore monté au-dessus de 7.650 m. Toutes s’étaient brisées sur les conditions extrêmes du K2, surnommé la « montagne sauvage ».
L’hiver est plus rude dans le Karakoram qu’en Himalaya
Le K2 est soumis en hiver à un vent très violent pouvant atteindre les 200 km/h. Les températures peuvent descendre jusqu’à -60° sur les parties sommitales.
L’hiver est plus rude dans le Karakoram qu’en Himalaya. Ce qui explique que la plupart des sommets népalais de plus de 8.000 m ont été vaincus en hiver dès les années 1980, alors que les quatre autres situés au Pakistan – outre le K2 – l’ont été dans les années 2010.
Les risques encourus sont multiples sur le K2, où plus 80 personnes ont trouvé la mort, contre près de 450 qui en ont réussi l’ascension. L’Espagnol Sergi Mingote a ainsi chuté samedi en redescendant vers le camp de base et s’est blessé à une jambe, selon son équipe.
4 équipes en compétition cette année
Cette année, pas moins de quatre équipes différentes et une soixantaine de grimpeurs étaient présents sur le K2, soit plus au total que toutes les expéditions précédentes rassemblées.
Membres de trois des quatre équipes initiales, les Népalais se sont regroupés et ont su faire preuve d’audace en profitant d’une fenêtre de beau temps, sans vent, pour se lancer à l’assaut du sommet.
Dans des conditions météorologiques optimales, ils ont franchi les dernières difficultés techniques, dont le redouté « Bottleneck », un passage étroit fortement incliné et surplombé par un sérac, où 11 personnes parties ensemble avaient trouvé la mort en août 2008, dans la pire tragédie qu’ait connue le K2.
Au moins un membre de l’équipe népalaise, Mingma Gyalje Sherpa, avait prévu d’atteindre le sommet sans utiliser d’oxygène. Les puristes regretteront toutefois sans doute que l’ensemble de l’équipe n’ait, semble-t-il, pas fait de même.
« Mingma G », son surnom, avait déjà grimpé 13 des 14 sommets de plus 8.000 m, dont deux fois le K2 (en été). Il avait renoncé prématurément l’hiver dernier sur cette même montagne. Il avait expliqué en décembre à l’AFP avoir alors été surpris par le froid et avoir beaucoup appris de cette expérience.
« Si vous regardez l’histoire des 14 sommets (de plus de 8.000 m) en hiver, vous ne trouvez aucun Sherpa sur la liste, juste des Polonais, des Italiens, des Espagnols, mais aucun Népalais. Donc c’est une bonne opportunité pour nous d’écrire le nom de Népalais » au palmarès, avait-il alors déclaré.
« Je serais content de voir le drapeau de mon pays sur cette liste en hiver. C’est l’un de mes plus grands rêves maintenant », avait-il ajouté.
Ce succès a été salué comme il se doit au Népal. « C’est une fantastique nouvelle. Pendant des décennies, les Népalais ont aidé les étrangers à gravir les sommets de l’Himalaya, mais nous n’avons pas reçu la reconnaissance que nous méritions », a déclaré à l’AFP Kami Rita Sherpa.