Après la manifestation spontanée de samedi à Serres dans les Hautes-Alpes suite à des attaques répétées de loups, c’est au tour du Champsaur Valgaudemar de réagir.
Selon le site d’informations des Alpes du Sud, Alpes 1, un collectif Anti-Loup de Haute-Montagne, basé dans le Champsaur – Valgaudemar «demande à Ségolène Royal l’autorisation toute l’année, y compris dans les Parcs Nationaux, les tirs de défense du loup par toute personne possédant le permis de chasse ou ayant suivi une formation ». Une lettre a été envoyée à la Ministre de l’Ecologie en faisant allusion à sa visite à Vallouise : « Votre visite dans les Hautes-Alpes nous a laissé espérer, mais les résultats ne sont pas à la hauteur de notre attente ». Une lettre qui ressemble à « un « appel au secours » lancé au gouvernement pour s’insurger de la « frilosité des pouvoirs publics ». Pour tous les éleveurs de montagne, « c’est la désespérance pour de nombreux paysans », selon le collectif. Une pétition a été lancée pour régler « définitivement la présence du loup ». Cette pétition a reçu 3000 signatures.
Le feu à la montagne
Tous les massifs sont en ébullition. Les mesures de protection des troupeaux ont été développées et renforcées alors que les attaques et les victimes se multiplient d’année en année y compris en ce début d’année 2015. Les tirs de défense sont limités et ce n’est pas vraiment le cœur de métier des bergers. Les tirs de prélèvement manquent d’efficacité. Sur un quota de 32 loups d’ici la fin du moi, seulement 18 loups ont été tués. Et ce ne sont pas 32 loups qui changeraient beaucoup de choses. Le quota non atteint, cela fait 10 ans qu’il en est ainsi….
« Des loups, on en voit tous les jours et curieusement l’ONCFS ne les voit pas pour les tirer » nous dit une éleveuse du Verdon sur les bords du lac de Sainte Croix. Et elle poursuit : « avant on voyait des renards sur le bord de la route maintenant ce sont des loups et des louveteaux ». Dans le camp militaire de Canjuers, « ils pullulent, il y en a partout… mais ils semblent en mauvaise santé ». Peut-être sont-ils atteints de l’échinococcose, maladie grave pouvant atteindre l’homme. Dans et autour du Mercantour c’est l’enfer. Mais « il n’est pas politiquement correct de le dire » nous dit un éleveur alors que « c’est une réserve à loups ». On ne peut effectivement pas tirer de loups dans la zone cœur. Même chose en Vanoise et dans les Ecrins. En cas d’attaque, le berger ne peut que regarder en spectateur « le massacre » de ses bêtes, sa présence et celle des chiens n’étant plus une garantie depuis longtemps.
– Loups contre chiens de protection : le loup est le plus fort
Dans le massif des Monges dans les Alpes de Haute-Provence, des estives s’organisent en forteresse avec des commandos pour chasser la bête. Dans le Vercors, sur certains itinéraires, les chiens de compagnie, même tenue en laisse sont interdits pour éviter les conflits avec les chiens de protection développés par les bergers. Une association est allé jusqu’à acheter des terres agricoles pour faire du «re-wilding» au détriment de l’élevage pendant qu’un militant entretien un espace de nourrissage à proximité de ce qui était une ferme d’élevage aujourd’hui fermée… faillite. C’était bien, semble-t-il, un objectif écologiste.
– Loup dans les Alpes du Sud : les éleveurs de montagne chez la Ministre de l’écologie
Voilà un résumé d’une situation explosive dans laquelle les randonneurs, vététistes, grimpeurs… vont évoluer dans quelques jours avec la transhumance des troupeaux
Des pressions permanentes
Eleveurs, journalistes, bloggeurs, sont souvent soumis à des pressions. Beaucoup n’osent pas parler de peur des conséquences. Il suffit parfois d’avoir une parole malheureuse sur Facebook ou de faire une plaisanterie mal compris pour se voir soumis à une plainte et des convocations par la police ou la gendarmerie. Ou tout simplement menacé de ne pas se voir verser aides, subventions ou indemnisation. Plus récemment, selon Loractu.fr : « Un éleveur de la Meuse hostile au loup va être jugé pour avoir posé un piège afin de tenter de capturer le prédateur qui continue de tuer des ovins dans le département ». Maintenant, il suffit d’avoir l’intention et tenter sans réussite pour être poursuivi… Comme dans toutes les bonnes dictatures.
Même situation dans toute l’Europe.
Contrairement à certaines affirmations militantes, la situation est la même en Italie où une hostilité contre le WWF se développe avec l’initiative malheureuse prise par le « Giro », tour cycliste d’Italie, en Suisse où il existe plusieurs collectifs contre les loups, en Espagne notamment dans le massif Cantabrique, en Allemagne, etc… Les organisations agricoles européennes se sont retirées des discussions avec le DG Environnement de la commission européenne alors que le FACE, l’organisation européenne des chasseurs, collabore avec les ONG environnementalistes. De nombreuses voix s’élèvent pour demander un retrait de la Convention de Berne et une révision substantielle de la directive européenne « habitats » (Natura 2000).
Autant dire que la vision idéale d’un consensus générale en faveur de la cohabitation grands prédateurs carnivores (ours, loups, lynx) et activités humaines n’est qu’illusion propagandiste et bien loin de la réalité.
Et les usagers de la montagne ?
Qu’il s’agisse des randonneurs, vététistes, grimpeurs…. Ils devront évoluer dans cet univers qui, pour beaucoup d’éleveurs et bergers est un véritable enfer. Il conviendra de respecter les panneaux d’information et de prévention concernant la présence des chiens de protection (et il n’y a pas que des Patou, il y a d’autres races moins conciliantes et plus efficaces) et la possibilité de tirs de protection et/ou de défense permanents et pas seulement en période de chasse. Et puis, le risque est effectivement que le feu soit mis à la montagne. Les anciens utilisaient ce moyen pour se débarrasser des ours et des loups. L’exaspération et le désespoir peut pousser à des gestes excessifs et être porteur des sérieux problèmes.
Il serait souhaitable que les pouvoirs publics cessent les palabres inutiles qui durent depuis plus de 20 ans à travers le Groupe National Loup – GNL – pour passer à une phase efficace avec des résultats visibles pour tout le monde. Eleveurs, sportifs et touristes y gagneraient.
Louis Dollo