Pour de nombreux touristes qui se rendront au camp de base du mont Everest cet automne, le voyage sera une aventure inoubliable. L’air fin, le paysage austère et les sommets aux pointes glacées percent un ciel d’encre et offrent de superbes arrière-plans pour n’importe quel accro à Instagram. Et pour les autres.
Cependant, ce qui est stupéfiant pour les touristes est pour les climatologues un spectacle apocalyptique. Ils voient tout autour d’eux, dans ce paysage extraordinaire, des preuves dramatiques d’un réchauffement rapide de l’atmosphère.
Les visiteurs qui reviennent dans la région de l’Everest 20 ans après remarquent aussi des changements : de grands lacs là où il n’y en avait pas, de la glace remplacée par des étangs, des rochers et du sable, la ligne de la neige sur les pentes qui remonte toujours plus haut et et des glaciers qui ont reculé et rétréci.
Conséquences visibles
Toutes ces caractéristiques sont visibles du sol dès le début du trek, au niveau de la ville de Lukla. Les rives de la rivière Bhote Kosi portent encore les cicatrices de l’inondation meurtrière de 1985, qui a emporté une longue section de la piste (dite Everest Trail) et de la centrale hydroélectrique de Thame. Elle a été causée par une avalanche qui s’est déversée dans le lac glaciaire Dig Tso et qui l’a fait déborder.
Plus haut, près de Tengboche, l’Imja Khola porte également des traces d’une énorme inondation glaciaire qui s’est abattue sur le flanc ouest de l’Ama Dablam en 1977. Et sous la formidable face sud du Lhotse se trouve l’Imja Tso, un lac de 2 km de long qui s’est formé et s’est agrandit au cours des 30 dernières années. Il n’existe pas sur les cartes de trekking des années 1980. Tous ces lacs se sont formés à la suite du réchauffement climatique, qui a fait fondre la glace.
Le glacier de Khumbu est le plus haut du monde et rétrécit lui de 30 mètres par an. Conséquence : le camp de base de l’Everest est maintenant 50 mètres plus bas que lorsque Hillary et Tenzing ont gravi l’Everest en 1955. Le camp de base de l’Everest était à 5330 mètres quand Hillary et Tenzing ont gravi l’Everest en 1953, aujourd’hui il est à 5270 mètres. Et aujourd’hui, la glace de surface sur le glacier le plus haut du monde a pratiquement disparu en raison du réchauffement.
Une vitesse de 70 mètres par an
En aval, la moraine terminale du glacier du Khumbu se trouve à 400 m au-dessus de Dughla. Il s’agit pour cette partie du glacier de débris descendus des pentes de l’Everest et des sommets environnants depuis des millions d’années. Concrètement, cette partie représente aussi l’étendue maximale de l’avancée du glacier au cours de la dernière période glaciaire.
En amont du camp de base, la cascade de glace de Khumbu canalise la glace de la combe occidentale en aval de l’Everest, du Lhotse et du Nuptse, et la fait passer vers le glacier en aval. Ici, la glace s’est retirée à une moyenne de 30 mètres par au cours des 20 dernières années. Mais elle s’est aussi rétrécie verticalement, perdant jusqu’à 50 m d’épaisseur.
Et le glacier s’aplatit également : les débris de couleur foncée, comme les gros blocs de rochers accélèrent la fonte de la glace près du camp de base. Mais les couches plus épaisses de blocs et de sable situées plus bas isolent la glace.
Reste que les glaciologues disent que ce profil plus plat signifie que la glace se déplace plus lentement, ce qui entraîne plus de formation de flaques et une fonte plus rapide de la glace en dessous.
La vitesse du glacier est de 70 mètres par an au camp de base et ralentit à 10 mètres par an plus bas, mais elle est nulle au terminus situé à 4 900 m. Cela signifie que la glace ralentit au fur et à mesure qu’elle est comprimée et que la pression est relâchée par la fonte de la masse de glace.
Multiplication des étangs supraglaciaires
Les chercheurs qui surveillent les étangs supraglaciaires affirment que leur superficie a augmenté de 70 % au cours des dix dernières années seulement. Les étangs sont bordés de falaises de glace et de grottes qui accélèrent la fonte. La glace fondue a creusé un chenal d’écoulement dans la moraine latérale gauche, de sorte qu’il n’y a pas de grand lac glaciaire sur le Khumbu, comme ailleurs au Népal.
Les scientifiques concluent que le glacier Khumbu n’est pas sur le point de disparaître et que la cascade de glace ne va pas se transformer en chute d’eau de sitôt. Cependant, le captage glaciaire permanent du glacier au-dessus de 6 000 pourrait commencer à s’épuiser dans le pire des cas, dans le scénario d’un réchauffement de +5 degrés.
Pour avoir un aperçu encore plus spectaculaire de la façon dont le réchauffement climatique modifie le paysage himalayen, rien de tel qu’une perspective aérienne. Le Nepali Times la semaine dernière a publié des images aériennes saisissantes du terrain sous l’Everest. La beauté stérile constatée prédit une période proche où le terrain sera dépouillé d’une grande partie de ce qui reste de sa couverture de glace.
J y suis passé en 1984 mes genoux m empechent d y retourner
Le plus beau voyage de ma vie parmi mes 90 voyages dans le monde
Quelle tristesse